Mise à jour : 19 juin 2025 / 30 avril 2016. #Architecture. #Montserrat. #Buenos Aires

 

 

 

Le Palacio Dassen (1913-1914)

 

Un bâtiment assez original dans le quartier de Montserrat à Buenos Aires; celui qui abrite le siège de l’Association Argentine des Acteurs (AAA).

Son originalité vient du fait qu’il s’agit à l’origine d’un hôtel particulier, celui-ci disposait en son sommet d’un observatoire astronomique.

Une commande d’un homme de sciences et mathématicien Argentin, Claro Dassen, faite en 1914 à un des architectes les plus prestigieux de l’époque, je parle de l’architecte Argentin d'origine norvégienne Alejandro Christophersen.

Comme toujours, n’hésitez surtout pas à apporter votre pierre à l’article si vous vous apercevez d’un oubli, ou pire d’une erreur, en écrivant en dessous un commentaire, en prenant contact avec moi par mail à petitherge@hotmail.com ou sur FB : https://www.facebook.com/petit.herge

Enfin, sachez que je peux vous proposer une visite du Palacio Dassen et de ses alentours pour vous en faire découvrir ses secrets.

 

Photos : A gauche la façade sur la calle Alsina, après rénovation. A droite, zoom sur l'observatoire (avant rénovation). 

 

Photos : A gauche, la façade du "palacio" sur rue.

Au premier étage, on voit le balcon donnant sur le salon principal transformé aujourd'hui en bar.

A droite, l'escalier en marbre menant du rez-de-chaussée au premier étage. 

 

 

Photo : Claro Cornelio Dassen

 

Claro Cornelio Dassen, enseignant, scientifique et ingénieur

 

Cet hôtel particulier est une commande de la famille Dassen, et plus précisément de l’Ingénieur Claro Cornelio Dassen (1873-1941) qui fut un physicien, mathématicien de renom, astronome puis professeur à l’université de Buenos Aires en 1927.

Ses parents Jean Baptiste Dassen et María Antonia Granvard étaient français et provenaient de La Bastide-Clairence toute petite localité des Pyrénées atlantiques. Jean Baptiste arrive à Buenos Aires en 1847 et épouse Maria Antonia en 1865 en l’église de Montserrat.

Leur fils, Claro (mais en français Clair) est né le 16 septembre 1873 et fit ses études primaires à l'école Rollin, calle Moreno, dont il obtint le diplôme avec mention. Il fit sa première année de lycée à l'école Negrotto et le reste de ses études au Collège national de Buenos Aires. En 1892, il entra à la Faculté des sciences exactes, physiques et naturelles pour poursuivre une carrière d'ingénieur civil.

Il obtient tous ses examens en 1897 et prépare ensuite sa thèse, "Métaphysique des concepts mathématiques fondamentaux et de l'analyse dite infinitésimale", et obtint également une médaille d'or pour son doctorat en physique et en mathématiques.

À 28 ans, il avait ainsi obtenu deux mentions dans les deux programmes.

Si ses études sont longues, c’est qu’à l’âge de 20 ans (en 1893), il devient orphelin et doit se mettre en quête de travail

 

Photo : Façade du Palacio Dassen. Photo 2018. 

 

Entre 1893 et ​​1894, il fut professeur d'arithmétique à l’Instituto Libre de Enseñanza Secundaria ; en 1895, il fut professeur de physique et de chimie à l'École Polytechnique. Il rejoignit la municipalité en 1897 comme chef des Travaux Publics à Barracas al Sur, (aujourd'hui Avellaneda).

L'année suivante, il rejoignit la Direction des Niveaux et des Chaussées (Niveles y Calzadas) de la Capitale comme ingénieur de section. Puis une fois le diplôme en poche (1901), il ne tarde pas à être promu ingénieur en chef en 1903, puis inspecteur général en 1908, poste qu'il quitta en août 1917.

C'est pendant ces années entre 1903 et 1917, qui s’occupa largement du système et de l’organisation du pavage des rues de la capitale.

S'il laisse son poste d’ingénieur de la ville en 1917, ce n'est pas pour autant qu'il arrête de travailler, car il ne lacha jamais sa vie d'enseignant. En effet, en mai 1898, il obtient son premier poste de professeur de mathématiques au Collège national de Buenos Aires. Il est professeur de géométrie descriptive et de théorie des mécanismes à l'Université de Buenos Aires (UBA) (1898-1925) et, le 16 mars 1927, il est nommé professeur honoraire de l'Université de Buenos Aires.

Il rejoignit aussi la Société scientifique argentine en 1892, juste après avoir commencé ses études. En 1898, il devint membre du conseil d'administration en tant que bibliothécaire, poste qu'il occupa pendant huit ans. C'est peut-être à cette époque que naquit son intérêt pour les livres. Il se constitua une importante bibliothèque personnelle et une précieuse galerie d'art.

Ce fut aussi un des grands promoteurs de l’esperanto en Argentine. 

A sa mort, une partie de son énorme bibliothèque (1200 volumes) fut donnée à la « Sociedad Cientifica Argentina », il en faisait partie depuis 1892 et en avait été un des directeurs entre 1927 et 1934.

Il sera même promu chevalier de la légion d’honneur en 1933 par l’Etat Français. Il a écrit trois ouvrages en français sur les mathématiques dont deux cette même année.

Photos : A gauche croquis exécuté par l'architecte Mederico Faivre dans les années 1980. A droite, un des plans originaux. 

 

 

Un palacio ésotérique :

 

On comprend alors qu'en 1913, alors qu'il mène sa vie d'enseignant à l'Université de Buenos Aires tout en occupant son poste d'ingénieur à la ville de Buenos Aires, à l'age de 40 ans il veut enfin faire bâtir sa maison pour y installer sa femme (marié depuis 1898 à Elisa Morales Claudeville), et ses 6 enfants (tous nés entre 1899 et 1908).

Il a les moyens d'acheter un terrain calle Alsina, à moins de 100m du Palacio Congreso (1896-1906 tout juste fini) qui rend le secteur à la mode et dont les terrains prennent de la valeur. 

Il dessinera lui même les plans de sa maison, mais passera aussi par un architecte dont la réputation n’était plus à prouver :  Alejandro Christophersen.

Totalement féru d'astronomie et d'astrologie avec un penchant indéniable en sciences ésotériques, sans vraiment cacher son appartenance à la maçonnerie, sa maison a plus l'aspect d'un phare urbain que d'un simple hôtel particulier.

En un mot, il veut une résidence de style académique surmontée d'une tour possédant au sommet à 60 m un observatoire astronomique.

Il mélange architecture à ses connaissances mathématiques, géométriques (il écrira 70 ouvrages sur les mathématiques et les mathématiciens), profite de ses connaissances techniques pour employer du béton armé (sans les faire apparaître sur les plans officiels) de peur que la structure ne puisse supporter le poids de sa tour. 

Déjoue le cartésianisme, pour monter l'ensemble de sa construction suivant certaines règles maçonniques (géométriques, proportions, fondations, utilisation de matériaux, ...), les 365 marches de sa tour seront là par exemple pour le démontrer, tout comme justement l'idée de l'élévation en quête d'une recherche d'évolution spirituelle.

Ne voulant rien laisser au hasard, l’Ingénieur Dassen s’occupera personnellement de l’avancement du chantier de sa résidence. Il faut dire que comme tout est symbolique, il ne laissera à personne d'autre la tache de voir si tout est place afin d'affiner sa pierre. 

 

Photos : A gauche l'escalier du hall principal menant du 1er au 2ème étage. A droite, le même hall vu du 2ème étage. (Après rénovation)

 

 

Photo : Vue du Palacio et de son observatoire. Vue arriere. (Avant travaux de restauration)

 

Le Palacio Dassen :

 

Bien que la parcelle ne dispose que de 423 m2 et qu’en façade le lotissement ne fasse que 7,60 m de large (sur 55,66 m de profondeur), Christophersen arrive tout de même à un tour d’exploit en présentant un projet d’une surface totale de 2000 m2.

Ceci en gagnant en hauteur, puisque son hôtel particulier arrive à une hauteur de 60 m !

Malgré l’étroitesse de l’ensemble, une grande verrière installée au dessus du hall du premier étage permet à toutes les pièces de recevoir tout de même la lumière naturelle (même au sous sol).

Tout en haut de l’édifice, un observatoire astronomique par lequel on arrive par un escalier comptant juste 365 marches. Il faut imaginer le quartier de Montserrat encore essentiellement construit sur 1 ou 2 niveaux, ce qui permettait du haut de l’observatoire d’avoir une vue globale sur une bonne partie du centre de la ville !

Du haut de son observatoire, on arrivait à voir avec une longue vue Montevideo.

On prête à ce bâtiment de nombreuses légendes (vraies ou fausses), comme le nombre de marche qui donne exactement le nombre de jour dans l’année et qui n’est pas un fait du hasard. On dit aussi qu’un passage secret rejoint le deuxième étage directement au sous sol. Et enfin, que les dimensions, les dessins et les éléments décoratifs de son bureau, de sa bibliothèque et de son observatoire correspondraient à ceux d’un temple maçonnique.

 

 

Photo : La loggia du premier étage du Palacio Dassen Photo 19 février 2018. 

 

Le "Palacio" possède de nombreuses fausses portes, des pièces cachés et un passage et escalier secrets reliant le 2eme étage au sous-sol. Au sujet du sous sol, on parle aussi un temple maçon. 

Dès 1914, cette hôtel particulier fut utilisé comme résidence par la famille Dassen, mais comptait déjà au rez-de-chaussée, sur la partie droite du bâtiment, un local de vente automobile.

A la mort de Claro Dassen (en 1941), le bâtiment fut vendu à l’Etat qui y installa  une dépendance du « Secretaría de Trabajo y Previsión », puis au début des années 1960 il fut occupé par "Imperial Textiles", une société textile. On dit que les salons du 1er étage servirent quelquefois à des défilés de mode.

Enfin en 1983, la « Asociación Argentina de Actores » vient s’y établir. En 2025, c’est toujours le siège de l’AAA.

 

Photos : Au dessus, photo aérienne de 1925 de la Plaza Congreso. A un bloc de la place, sur la calle Alsina, se profile la silhouette du Palacio Dassen (entouré en rouge). En 1925, c’est encore un des bâtiments les plus hauts du quartier. (Cliquez sur la photo pour l'agrandir) 

En dessous, photo prise 5 ans plus tard en 1930, toujours à partir de la Plaza Congreso. L’observatoire du Palacio Dassen est entouré en rouge. Il est certain que dans les années 30, on peut encore avoir une vue plongeante sur toute la Plaza Congreso à partir du Palacio. (Cliquez sur la photo pour l'agrandir) 

 

 

Photos : Zoom de la photo de 1925. On peut voir plus en détail les étages.

Aujourd’hui impossible de réaliser ce type de photo, puisque que le Palacio Dassen est totalement entouré d’immeubles plus hauts que lui. A droite, le zoom de la photo de 1930, il s’agit de la même façade donnant sur la calle Alsina. 

Le Palacio compte 9 étages. Au 1er les pièces de réception, au 2eme les pièces des appartements, au 3ème terrasse sur la rue, mais une très vaste terrasse sur la partie arrière du Palacio. Au 4ème, étage avec plafond élevé. Au 5ème, étage bas, au 6ème terrasse et début de la tour de l’observatoire. Au 7ème, étage principale de la tour avec un balcon l’entourant. Au 8ème , un étage avec de simples oculus, au 9ème l’observatoire.

 

 

Les conseils du Petit Hergé :

 

Bien que ce soit aujourd’hui un bâtiment à usage privé pour les services de l’AAA, vous pouvez toujours demander à la réception l’autorisation de monter au premier étage.

Vous aurez comme ça l’occasion de prendre l’escalier et de voir les anciennes pièces de réception de l’étage principal.  Celle donnant sur rue (l’ancien salon) est aujourd’hui transformée en bar. Vous pouvez y prendre un café (je l’ai fait quelquefois).

Le bâtiment est ouvert en semaine très peu d'heures entre 10h30 et 15h. 

 

Comme toujours, n’hésitez surtout pas à apporter votre pierre à l’article si vous vous apercevez d’un oubli, ou pire d’une erreur, en écrivant en dessous un commentaire, en prenant contact avec moi par mail à petitherge@hotmail.com ou sur FB : https://www.facebook.com/petit.herge

Enfin, sachez que je peux vous proposer une visite du Palacio Dassen et de ses alentours pour vous en faire découvrir ses secrets.

L’adresse : Adolfo Alsina 1762. (Métro Congreso).

 

A lire aussi dans le Petit Hergé :

- La Confiteria del Molino.

- El Palacio Congreso.

- La Casa de los Lirios.

- La Avenida de Mayo.

 

 


 

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