Le Rosedal de Palermo à Buenos Aires
23 juil. 2011Mis à jour : 30 novembre 2014 / 22 juillet 2011. Catégorie : Buenos Aires
Article écrit par Thomas Lemoine et Hergé.
"...Tout progrès de la ville, nécessite des promenades et des parcs qui permettent d’exposer la culture et le bon goût, et il a été décidé de créer une Roseraie dans lequel on pourrait rencontrer et réunir la flore la plus belle et la plus variée collection de cette fleur… " Ce texte est extrait des mémoires des travaux entrepris par la Direction Générale des Espaces de la Ville de Buenos Aires en 1914. La difficulté fut de trouver un endroit idéal, d’accès facile, et surtout dont son dessin permettrait de donner une idée la plus exacte possible de ce genre de collection. Par bonheur le choix se porta sur un emplacement qui fait que la "Roseraie" de Buenos Aires est placée dans un endroit et sur un terrain que peu d’autres villes ont pu offrir à un parc. Photo : El Templete. Petit Herge 17 octobre 2014. |
Photos : Le Rosedal de Buenos Aires. 17 octobre 2014. Photos Petit Hergé. |
Sur les terres de Juan Manuel de Rosas, le nouveau Palermo de San Benito : En 1836, le terrain sur lequel se trouve le Rosedal est inculte (souvent inondé) et abandonné et Don Juan Manuel de Rosas les achète pour y faire construire sa résidence d’été. Il fait entreprendre de suite la construction de son palais qui s’achève en 1838 peu avant le décès de son épouse. C’est Rosas qui donna le nom de Palermo à sa propriété, le nom provenant probablement d’une chapelle montée dans les alentours dédié à San Benito de Palermo. Sur les documents de propriété de sa propriété figure le nom de Palermo de San Benito. A partir des années 1840, d’autres demeures furent construites aux alentours et la population de la zone augmenta, et on ne tarda plus à désigné d’un simple « Palermo » toute cette campagne située alors en dehors de Buenos Aires. Suite à quelques « différents » politiques, entre autre la défaite de Rosas à la bataille de Caseros du 3 février 1852, à la fin de laquelle il se refugiât dans l’ambassade d’Angleterre et fuit en Europe, sa propriété est confisquée par le nouveau gouvernement. Elle resta debout jusqu'en 1899, quand le Président Roca décida de la faire voler avec de la dynamite. Photo : Une des rares photos du Palais de Roca |
El Parque Tres de Febrero : Il faut attendre plus de vingt ans, pour que sous l’impulsion du président de la République Domingo Faustino Sarmiento, soit votée une loi le 27 juin 1874 pour transformer ses terrains (appartenant à l’Etat) en parc. L’ancienne propriété de Rosas est nommée « Parque Tres de Febrero » en mémoire à la bataille qui mis fin à son pouvoir sur le pays. Il est décidé de créer dans ce parc, une réserve de tous les animaux vivant en Argentine, un musée regroupant les pièces de paléontologie, ainsi qu’un parc regroupant toutes les espèces botaniques existantes sur le sol de la Nation. La réserve d’animaux deviendra rapidement « El Instituto Zoológico de la Nacion », qui se transformera ensuite en zoo de Buenos Aires (toujours existant), le parc regroupant les especes botaniques deviendra « El Instituto botánico de Palermo » (toujours existant au même endroit), quant au reste du parc au fil des années il s’étendra vers les berges du Rio de la Plata. Les zones marécageuses seront peu à peu comblées, plantées d’arbres et tracées d’avenues. Le 11 novembre 1875 on inaugure le « Parque del 3 de Febrero » en présence du président de la République Nicolás Avellaneda. C’est ce qu’on dénomme la 1ère section du parc. En février 1888, le parc passe sous l’autorité de la ville de Buenos Aires. |
Vidéo : Le Rosedal filmé par un drone en septembre 2014. 5 mn 14 s. |
Photo : Vue du "Pont Grec" vers les bassins. Photo Petit Hergé. 14 octobre 2014. Ci dessous la même vue en 1914. |
Infographie : Vue en perspective des jardisn du Rosedal de Buenos Aires. (2011). |
Au sud du jardin, on peut admirer un très beau patio andalou, cadeau de la ville de Séville en 1929. En fait l’architecte français Jean C. Forestier est contacté en 1924 par la ville de Buenos Aires pour faire une évaluation des modifications à apporter aux parcs de la ville. Ce travail fait partie de tout un plan régulateur mis en place par la ville. Le français ne devant s’occuper que des espaces verts. Lorsque Jean C..Forestier débarque à Buenos Aires en 1924, il y reste un mois, et le Directeur des parcs et jardins, Charles Thays l’accompagne dans ses visites et lui remet tous les dossiers y compris les projets restés à l’état d’études. L’Architecte doit à la fois s’occuper des parcs déjà existants et des projets de nouveaux parcs à l’étude. Ce n’est qu’une fois de retour à Paris, qu’il se met à plancher sur différents types de projets et travaille sur un "Jardin Espagnol" à placer dans le Parque Avellaneda. Le projet est adopté par la ville de Buenos Aires, mais pour des sombres histoires de budget, le jardin ne voit jamais le jour et reste dans les cartons ! C’est en 1929, que le projet refait surface quand la ville de Séville veut faire don d’un monument à la ville. Buenos Aires lui ressort le projet, Séville accepte et finance les travaux ! Le Jardin Espagnol prend le nom de Patio Andalou (plus petit que le projet initial) et se place au sud du Rosedal, à l’emplacement d’une Confiteria que l’on nommait sous le nom de El Pabellón de los Lagos, vestige de l’Exposition Industrielle de 1910. On la démolira pour y placer le Patio. Le Patio est une galerie surélevée couverte d’une pergola entourant un bassin et une fontaine auquel on accède en descendant un des quatre petits escaliers placés sur chaque coté. Le tout est recouvert d’azulejos (céramique bleutée). Sur la base du bassin on peut lire : "A la caballerosa y opulenta Ciudad de Buenos Aires en testimonio y comunicación espiritual, Sevilla ofrece esta muestra de la industria de Triana, el barrio de los laboriosos alfareros y de los intrépidos navegantes". Il a été entièrement restauré en 2008. |
L’abandon et la renaissance du Rosedal : Au fil des années, le Rosedal tombe dans l’oublie, les éléments architecturaux se détériorent, les pelouses se convertissent en terrain de foot, et les rosiers ne sont qu’un vague souvenir des porteños les plus anciens. Un décret est même publié en 1992 des autorités municipales pour interdire aux chauffeurs de taxis, remiseros et autres conducteurs de bus de venir laver des pièces moteur dans le patio Andalou et de s’en servir comme atelier mécanique de réparation ! Première restauration du parc en 1994, on ferme le jardin, et avec l’aide des fonds de l’entreprise pétrolière YPF, la ville de Buenos Aires met deux ans à remettre en l’état la Roseraie en essayant grâce aux documents d’archive de redonner au parc la même physionomie que celle du jour de l’inauguration de 1914. Le 03 Juin 1996, on rouvre les grilles pour une nouvelle inauguration ! Deuxième étape de restauration, l’année 2008, où on entreprend de sauver la Pergola et le Patio Andalou. Aujourd’hui c’est chose faite et le jardin n’a jamais été aussi beau. |
Allons-nous en au bois...
La Roseraie de Palermo, c’est donc une ballade. Une ballade à travers l’histoire, les styles et surtout une ballade à travers la beauté de magnifiques roses. L’endroit compte en effet 1189 variétés de roses répertoriés et classées selon le meilleur parfum, la plus belle couleur … Ce sont 12.000 roses qui chaque année éclusent ! Paradoxalement, la roseraie ce n’est pas seulement la beauté ses fleurs sublimes. A l’occasion de cet article, je suis moi-même aller me promener là-bas par une belle journée du mois de Juillet et donc, pendant l’hiver austral. Alors que je m’interrogeai sur la question, un jardinier expert se chargea de me rappeler avec une pointe de dérision qu’en dépit du beau temps, les roses ne fleurissent pas en hiver mais à partir d’Octobre … Certes. Malgré ce léger oubli, je continue ma promenade. J’aperçois alors Alfonso Reyes, Dante, Jorge Luis Borges et pense à ma douce Juliette en croisant William Shakespeare. Je suis donc dans le Jardin des Poètes et une vingtaine de bustes sont disposés çà et là tout autour de moi. L’endroit est calme et reposant et il faut profiter de la matinée ou du début de journée pour le parcourir au risque de se voir fermer les portes au nez car il ferme assez tôt surtout l’hiver. Tout est tranquille et en paix dans cette bulle d’air. Mais tout d’un coup j’entends des sons stridents ! Plusieurs coups de sifflets ! Deux femmes habillées de gilets jaunes fluo s’agitent et gesticulent ! Que peut-il bien se passer ? Un accident de pédalo, un malaise, voir un attentat ? Ah non, j’ai juste mis un pied sur la pelouse … Très bien cela ne se reproduira plus mesdames les gardiennes … Cet incident surmonté, je passe par le magnifique patio Andalou aux couleurs bleutées dont nous avons parlé précédemment. Puis je rejoins les bords du lacs ou des couples font du pédalo en se regardant amoureusement et ou d’autres prennent des photos devant l’ile au centre de la roseraie. L’endroit est vraiment magnifique et il faut prendre le temps de flâner pour en profiter pleinement. Je me dirige vers la sortie et emprunte le magnifique pont grec. Me voilà directement replongé dans la frénésie citadine en espérant que celle-ci ne m’envoie pas sur les roses mais je n’ai de toute façon plus les nerfs à fleur de peau… En espérant que ce dernier paragraphe ne vous ai pas semblé trop fleur bleu chers lecteurs. |
Les conseils du Petit Hergé : (de novembre 2014) Je recommande toujours d’aller se promener dans le Rosedal de Buenos Aires. Tout d’abord pour s’oxygéner un peu, surtout si ça fait quelques jours que vous ne bougez pas du centre de Buenos Aires. De plus, le Rosedal est vraiment une des plus belles roseraies au monde (La roseraie de Bagatelle n’est pas non plus moche). En passant sachez que celle de Bagatelle date de 1907, donc de 7 ans l’ainée de celle-ci. En France à cette époque Jules Gravereaux était l’expert le plus éminent en la matière (le propriétaire et le créateur de la première roseraie moderne au monde, la roseraie de L’Haie les roses) et avec le paysagiste français Edouard André se lancent dans la création de son propre jardin puis participe à la création de celui de Bagatelle. Si je vous parle de cela, c’est pour attirer votre attention sur le modèle parisien ou tout du moins français toujours à la mode en matière d’urbanisme, architecture mais aussi en matière de jardins, de paysagisme et de rhodologie (ouf, je l’ai placé). Le Rosedal création de l’Argentin Benito Javier Carrasco est l’élève du paysagiste français Charles Thays. Carrasco est parti entre 1906 et 1908 pour deux ans de voyage aux Etats Unis mais surtout en Europe et lors de son passage à Paris a pu passer voir Bagatelle et l’Haie les Roses. Les quelques éléments à voir ponctuant votre visite sont le « Patio Andalou » (Patio Andaluz), la « Pergola », le « Pont Grec » (Puente Griego), le « Jardin des Poètes » (El Jardin de los poetas), les « Fontaines » (Las Fuentes), l’Ile (la Isla) et le « Petit temple » (El templete) et le « Jardin des roses » (Jardin de Rosas) qui regroupe les plus belles roses au centre du jardin. Les heures d’ouvertures sont de 08h à 18h, en été (décembre à mars), le jardin ferme plus tard à 20h. N’oubliez pas que le lundi, le jardin est toujours fermé au public, donc visite du mardi au dimanche inclus. Pour voir les roses à la plus belle époque à partir d’octobre et jusqu’à mars. L’entrée est gratuite, et les gardiens (souvent des gardiennes) ont le coup de sifflet facile, c’est l’unique parc de Buenos Aires où il est absolument interdit de marcher sur les pelouses ! Ci dessous d'autres idées de visites de parcs et jardins à Buenos Aires ...
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