Mise en ligne : 05 octobre 2011. Article écrit par Linda Souak.

Quand l'Argentine se met aux produits biologiques :

En France, la tendance du « bio » n’étonne plus personne. Cela fait déjà quelques années que les rayons des supermarchés se sont métamorphosés pour faire place à ces nouveaux produits plus sains, dont on peut connaître l’origine.

 En Argentine, la situation est bien différente. On pourrait croire que la déferlante des produits bio vient seulement de s’abattre sur le pays, or il n’en est rien. En termes de superficies, l’Argentine est le deuxième producteur  de produits issus de l’agriculture biologique derrière l’Australie.

Et pourtant, il semble que l’Argentine commence seulement à se préoccuper de la consommation de produits biologiques.

L’Argentine face à ses contradictions :

Aujourd’hui on fait l’éloge d’une Argentine qui promeut l’agriculture biologique –notamment en Patagonie où sont concentrées les plus grandes parcelles- et qui tire l’Amérique Latine vers les nouvelles tendances ; mais ce qu’on omet souvent de dire, c’est que l’Argentine est aussi le « champion des OGM », et pour cause : le pays a été l’initiateur du soja transgénique en Amérique Latine en 1996 grâce –où à cause, tout dépend du point de vue- au géant mondial Monsanto.

Avec près de 22 millions d’hectares de plantations transgéniques à l’heure où la société mondiale ne jure plus que par les produits naturels, l’Argentine semblait avoir pris un train de retard.

Et pourtant. C’est là que la situation surprend ; à y regarder de plus près, l’Argentine est en fait un précurseur en termes de produits biologiques- traduction la plus appropriée pour le terme productos organicos. En effet jusqu’au milieu des années 1990, la production nationale  s’inspirait des lois et cadres européens et se démarquait ainsi de ce qui avait pu se faire dans les pays voisins.

Jusqu’à cette année, l’Argentine était alors le pays d’Amérique Latine qui concentrait le plus de parcelles biologiques – 3 millions d’hectares- mais il semble que le réveil récent du Brésil soit venu troubler son image de leader du continent.

Cependant il est important de noter une chose : s’il est vrai que l’Argentine  est un acteur important concernant la production de « bio », elle n’en est pas pour autant un consommateur acharné. En effet, 98% de sa production est destinée à l’exportation, ses deux plus gros clients étant l’Europe –qui absorbe à elle seule les trois quarts de la production- et les Etats-Unis.

Mais comment expliquer qu’un pays si impliqué dans la production de produits biologiques ne se sente pas concerné par cette tendance qui gagne de plus en plus de terrain ?

Pour cela, il faut remonter à la crise qui frappa le pays en 2001, car en effet avant celle-ci on remarque que le marché national écoulait 25% de la production nationale en ce qui concerne les produits « bio » (agriculture, viandes, textile). Après le choc de 2001, les prix onéreux de ces produits n’ont alors plus trouvé preneurs dans une société où l’on parvenait à peine à joindre les deux bouts.

Ceci explique le fait que la consommation de « bio » soit passée de 25% à 2% de la production nationale.

Aujourd’hui,  on ressent de nouveau les signes de cette tendance « bio » en Argentine à travers la multiplication des points de vente consacrés à de tels produits, l’arrivée du bio dans les supermarchés, la prise de conscience générale quant aux conséquences des OGM ainsi qu’une diffusion de ces idées par le Gouvernement et les institutions qui l’entourent.

Photo du haut : Jusqu'en 2008, l'Argentine etait troisième producteur derriere l'Australie et la Chine, aujourd'hui elle passe au deuxième rang !

      

Photos : A gauche, dégustations de produits argentins bios dans un supermarché de New York, au centre les produits argentins au salon BioFach du Japon, et enfin à droite le plus grand salon au monde des produits bio, le BioFach de Nuremberg.

Comment l'Argentine "surfe" sur la vague bio :

Comme il l’a été dit précédemment, le pays continue à l’heure actuelle d’exporter une grande partie de sa production bio en Europe et aux Etats-Unis. Or il s’agit d’un marché en perpétuelle croissance qui brasse quelques  deux cent millions de dollars en Argentine, et l’on s’attend – à l’échelle mondiale- à une hausse de l’ordre de 7 à 10 % pour la fin de l’année 2011.

Avec des clients chaque fois plus préoccupés par la provenance de leurs aliments et par les conséquences que cela peut avoir sur leur santé, le pays peut espérer accroitre ses bénéfices en tentant de diversifier sa production car en effet, lorsqu’on parle de « bio » on fait généralement allusion à l’agriculture cependant ce n’est pas tout puisque le terme s’utilise aujourd’hui pour les vins, les oléagineux, la laine, le thé mais aussi les produits cosmétiques. Or l’Argentine produit beaucoup de ces produits d’où d’importantes opportunités de croissance.

Et ces opportunités sont à présent renforcées par le fait que les argentins semblent aussi se mettre au bio : on assiste actuellement au développement de magasins spécialisés dans la vente de tels produits dans les quartiers aisés –notamment à Palermo et à Barrio Norte- et plus étonnant encore, les supermarchés commencent à consacrer quelques rayons à l’alimentation biologique afin de viser un public plus large. Toutefois cette tendance est à nuancer ; s’il est vrai que le bio intéresse de plus en plus en Argentine, le phénomène reste limité et très localisé pour des raisons évidentes de coûts élevés par rapport aux produits traditionnels. D’autre part, pour un pays dont la politique est de nourrir la population, il n’est pas évident de mettre en avant une agriculture dont les nationaux ne pourraient jouir. A ce sujet, il est important de rappeler que c’est par ce biais que Monsanto est parvenue à s’implanter en Argentine il y a un peu plus de dix ans. Initialement les semences étaient mêmes appelées les « graines magiques » par les petits exploitants argentins. Une décennie après, les dégâts causés par ce type d’agriculture (érosion des sols, pollution de l’eau) ont fini par remettre en cause le système.

Promouvoir le "bio" aujourd'hui en Argentine, une affaire d'Etat :

Même s’il a été mentionné précédemment que la politique nationale visait avant tout à nourrir le plus grand nombre d’argentins, il n’empêche qu’il reste dans son intérêt de promouvoir un secteur en plein boom et qui constitue une source de revenus non négligeable.

C’est pourquoi les acteurs du bio se sont regroupés autour de diverses institutions qui ont pour objectifs de promouvoir ce modèle et de faire prendre conscience à la population de l’importance que cela peut avoir. C’est notamment le cas du MAPO ( Movimiento Argentino para la Produccion Organica) créé en 1995 ; il s’agit de la plus grande ONG argentine en rapport avec le bio : celle-ci tente de favoriser les liens entre petits producteurs en créant par exemple des sortes de collectivités où tous pourraient s’entraider et confronter leurs parcours. De plus, elle travaille conjointement avec le gouvernement afin de faire adopter des lois en faveur de la promotion du bio.  A ce sujet, une loi dite de Promocion de Productos Organicos a été votée en 1999 afin d’encourager et de faciliter la production nationale et d’autres projets semblent en cours de réalisation. Ainsi le gouvernement semble tout à fait conscient des opportunités offertes par le secteur et est donc prêt à s’investir afin de hisser le pays au rang de premier producteur mondial de produits biologiques.

 

Quelques adresses pratiques à Buenos Aires :

Enfin pour terminer, voici quelques lieux incontournables pour se procurer des produits bio à Buenos Aires aujourd’hui :

Ø      Jardín Orgánico
http://www.jardinorganico.com.ar

Ø      El Rincón orgánico
http://www.elrinconorganico.com.ar

Ø      Almacén orgánico
http://www.almacenorganico.com.ar

L'avis du Petit Hergé :

En effet la crise de 2001 – 2002 avait mis un frein au développement du bio, en tant de vaches maigres, on n’est plus préoccupé à remplir les assiettes qu’à savoir d’où viennent les produits. L’Argentin est consommateurs de produits basiques, moins raffinés que les européens et finalement se contentant de peu de choses du moment que la quantité y soit ! Le produit « organique » comme on dit ici est encore un concept pour l’argentin moyen loin de ses préoccupations, quant aux personnes ayant les moyens de s’en procurer, il hésite encore a savoir si il s’agit que d’un concept marketing ou bien réel….Bien plus pragmatique et un peu moins romantique ou idéaliste que l’européen, aura-t-il encore le rêve de croire que l’on a de l’agneau bio en Patagonie après les passages successifs des cendres du Puyehue est réel ? Ne noircissons pas le panorama, en effet la production bio est en pleine explosion en Argentine, mais pour l’export ! A se demander aussi si les pommes vendues par le marchand en bas de chez moi sont les mêmes vendues en Allemagne sous l’étiquette bio ? Ici en tout cas, ce n’est pas encore pour la majorité des argentins un argument de vente et valorisable sur une étiquette. Il y a de grandes chances sur l’étal du marchand porteño (bolivien) de fruits et légumes bios et transgéniques soient cote à cote dans le plus simple anonymat.

A lire dans le Petit Hergé :

Franchises et marques argentines alimentaires à l'export- Marques et franchises argentines alimentaires.(Août 2010). Les exportations de produits alimentaires argentins ont fortement augmenté ces deux dernières années, et déjà plus de quarante entreprises ont un pied à l’étranger. Déjà dans plusieurs villes dans le monde on peut trouver des produits typiquement argentins (empanadas, café, glaces, alfajores…) dans des boutiques qui sont souvent des franchises de marques argentines (comme Havanna, El Noble, Freddo ou Almacén de Pizzas)...(Lire la suite).

Les cafés à emporter font fureur à Buenos Aires- Les cafés à emporter à Buenos Aires.(Mars 2011). Le changement fut si brutal que même Starbucks ne put le croire. Il est vrai que la marque à la sirène est arrivée avec certaines prétentions, mais il est évident qu’elle l’a fait avec une crainte réelle : la crainte d’un envahisseur qui arrive sur des terres inconnues. Finalement ce fut une excellente surprise puisque le porteño s’est révélé sans attaches à un café particulier...(Lire la suite).

 

Le panier de la ménagère à Buenos Aires- Le panier de la ménagère à Buenos Aires.(Septembre 2010). L’inflation qu’ont connu les produits alimentaires ces derniers temps devient de plus en plus problématique pour beaucoup de foyers argentins. En effet, selon les chiffres de la Direction Générale de Statistiques et Recensementsde la ville de Buenos Aires, 30,7% des habitants de la capitale ne parviennent déjà plus à couvrir leurs dépenses mensuelles totales...(Lire la suite).

 

La Renault Mini 4 en Uruguay- La Renault 4 S Mini en Uruguay.(Août 2010). Tout le monde connaît la “Quatrelle”, bien sur ! (Je veux dire la 4L ou plutôt la R4L ou Renault 4 Luxe). De ce coté de l’Atlantique sud, en Argentine, la bonne vielle 4L a pris du service de 1963 à 1987 sur les chaînes de montage de Renault-IKA Cordoba. Mais si on traverse le Rio de la Plata pour se rendre chez nos voisins uruguayens, là-bas on y voit un bien drôle de modèle !..(Lire la suite).

 

 
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