Mise à jour : 19 juillet 2010. Article écrit par Martin Texier.

Un jour historique :

 

"C’est un jour historique" a déclaré le 15 juillet Miguel Pichetto, leader du parti majoritaire au sénat argentin. Le 5 mai 2010, après un débat de plus de 12 heures, les députés argentins avaient accepté le projet de loi autorisant le mariage homosexuel en Argentine, a 125 voix pour, 109 contre et 6 abstentions. Le sénat a commencé à étudier le projet à partir du 18 mai et a voté le 15 juillet 2010, à 33 voix pour, 27 contre et 3 abstentions, pour l’adoption du projet de loi de la chambre basse sans aucune modification à apporter, après quinze heures de débat. L’Argentine est donc désormais le dixième pays du monde à autoriser le mariage homosexuel et l’adoption par un couple homosexuel, et le premier en Amérique latine.

Depuis 2008, certaines "autorisations" :

 

Jusqu’à présent seul le mariage hétérosexuel était autorisé en Argentine, cependant certaines formes d’union civile accordant les mêmes droits aux couples homosexuels qu’aux couples hétérosexuels, en dehors du mariage et de l’adoption,  existaient dans différentes provinces argentines et notamment dans la Capitale Fédérale de Buenos Aires (depuis 2002). En 2008, la première loi sur l’union homosexuelle à avoir été adoptée au niveau national autorisait les veufs et veuves d’un couple homosexuel à percevoir la pension de son partenaire.

En décembre 2009, Alejandro et José Maria ont été les deux premiers homosexuels à se marier en Amérique Latine. Leur union, refusée à Buenos Aires puis approuvée par la préfecture de la Terre de Feu, a été à l’origine du débat sur le mariage homosexuel en Argentine. Leur union leur a permis, comme à quelques autres couples homosexuels en Argentine, de bénéficier d’avantages fiscaux, d’avantages en entreprise, et de faire des demandes de prêt uniques.

Photo : Alex Freyre y José María di Bello, premier mariage d'Amérique Latine en 2009 dans la ville de Buenos Aires. Le mariage etait alors accepté à Buenos Aires, sans pour autant que le gouvernement National le valide.

Un débat agité :

 Le débat national qui a entouré celui du sénat a mobilisé de nombreux argentins et a révélé la complexité du sujet dans un pays où les habitants se déclarent à 91% catholiques et où l’église s’est majoritairement opposée au projet de loi. Cependant, au sein même des groupes religieux et des partis politiques les divisions étaient nombreuses. L’église évangélique a par exemple approuvé le projet loi, tout comme certains sacerdoces de l’église catholique, même si la grande majorité des évêques se sont opposé au projet, en menant une campagne très violente contre le projet, certains parlant même d’une « guerre contre Dieu ». L’argumentation des opposants au mariage homosexuel était principalement axée sur le fait que, selon eux, « les enfants ont droit à un père et une mère ».

Photos : Manifestation avant le vote sur la Plaza Congreso contre le mariage homosexuel.

Un succès pour Kirchner :

Pour être définitivement adopté, le projet de loi n’attend plus que la signature de Cristina Kirchner. Elle était en déplacement officiel en Chine lors des débat au Sénat, mais a continué à appuyer à distance le projet comme elle l’avait fait depuis le début. Elle s’est une nouvelle fois opposée aux propos de l’église qui avait organisé au début d ela semaine une manifestation face au Congreso. La présidente Crisitina Kirchner n'a pas hésité à qualifier les idées de l'épiscopat de positions "datant de l’inquisition".

Kirchner avait fait un pari risqué en soutenant le mariage homosexuel depuis un an, et cette nouvelle loi est pour elle une victoire dans le cadre de la préparation aux prochaines élections qui auront lieu l’année prochaine en Argentine.

Ne cachons pas non plus, qu'elle même avait lancé cette proposition de loi pour montrer à l'opinion publique que les partis d'opposition n'étaient pas unis. (Ceux ci montent en ce moment une stratégie d'alliance pour faire face au PJ Kirchnériste pour les élections présidentielles de 2011). D'autre part rien de mieux que de lancer un sujet brulant aux médias, histoire de ne parler des autre sujets qui fachent comme l'insécurité, l'hyper inflation, la baisse du pouvoir d'achat, la montée de la pauvreté, etc...

Photo : La semaine chinoise de Cristina Kirchner, présente au pavillon Argentin de l'Expo Universelle de Shangaï.

Photo : Tableau de vote du Sénat : 33 "Pour", 27 "Contre" et 3 "Abstentions".

La contreverse continue :

Bien que la loi soit votée, le débat n’est toujours pas terminé et la division surtout dans les "contre" continue.

Vendredi 16 juillet, le lendemain de l’adoption du projet, Marta Covella, juge de la ville de General Pico dans la province de La Pampa, a déclaré qu’elle n’accepterai pas de marier deux personnes du même sexe, même si cela devait lui coûter son poste et même sa vie car "seul ce que pense Dieu compte". D’autres manifestants continuent à critiquer la décision et les journaux locaux alimentent le débat.

Elle affirme qu'elle a le droit d'être "objecteur(trice) de conscience" qui l'empèche d'exercer son devoir de marier des couples homosexuels. Elle continue a déclarer devant la presse que "Dieu n'approuve pas les choses mauvaises". Voilà donc un autre sujet qui s'ouvre et qui va alimenter les medias pour la semaine qui arrive. Que va t'il se passer si les juges et fonctionnaires de l'Etat refusent de marier les couples homosexuels ? Quels incidences sur leurs postes, devront ils démissioner, auront il un blâme ?

Dans le cas de Marta Covella, elle laisse la responsabilité des mariages homosexuels à son supléant Marcelo García Mossman, qui lui aussi à son tour à déclaré "Par principes chrétiens, je ne peux pas le faire, car dans la Bible, Dieu n'approuve pas cette forme de vivre !". Nous ne sommes pas à la fin des débats... Le 13 août aura lieu à Buenos Aires le premier mariage homosexuel en application avec la nouvelle loi. On reviendra sur le sujet à cette date !

La situation dans le Monde :

Jusqu’à aujourd’hui, 10 pays ont légalisé le mariage gay, dont 6 en Europe. Aux Etats-Unis, le mariage gay est légal dans six états. Plusieurs pays sont aussi entrain d’étudier un éventuel projet de loi pour le mariage homosexuel.

D’autres pays, dont la France, reconnaissent d’autres formes d’union civiles (comme le PACS) pour les homosexuels avec des droits similaires.

Lors de l’annonce de l’acceptation du projet de loi, le président du sénat a annoncé que le mariage homosexuel était « la direction vers laquelle le monde se dirige ». Cette avancée pour les droits des homosexuels va sans doute relancer le débat dans de nombreux pays. En Amérique latine, le Brésil, la Colombie et l’Equateur reconnaissent une forme d’union légale pour les homosexuels, tandis que certains pays le considèrent comme un crime (en Guyana par exemple). Un débat à suivre…

Infographie : L'Argentine, premier pays latino américain à adopter la loi de mariage homosexuel.

A lire dans le Petit Hergé :

- Actualité Argentine, les articles.

- Elections législatives de 2009. (Mai 2009). 

Buenos Aires, la ville des entrepreneurs. (Juillet 2010).

- Les économie dans l'immobilier porteño. (Juillet 2010).

- La guerre des cellulaires en Argentine. (Juillet 2010).

- Le sentiment d'insécurité. (Juillet 2010).

- Nouveau Ministère du Tourisme. (Juillet 2010).

- Inflation en Argentine en 2010. (Juillet 2010).

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