Mise à jour : 18 mai 2017. Catégorie Humeur.  

A mort les clichés touristiques qui nous abrutissent !

 

Je ne supporte plus de voir toujours les mêmes clichés sur les quartiers de Buenos Aires. Quant aux ecrits ils sont tout autant réducteurs. Un propos unique, repris en masse par tous les guides et qui provoque chez nous une pensée et une envie unique !  

Si à Montmartre il n’y a que des peintres et des japonais, j'y vais pour voir si les japonais n'ont pas été remplacés par les chinois. Si dans le Marais il n'y a que des homosexuels et des bobos, j'y passe pour m'assurer que les bobos ne sont devenus tout simplement homosexuels. Quant aux puces de St Ouen que l'on dit aux mains  des arnaqueurs et des receleurs, j'y courre des fois que je puisse moi aussi y faire de bonnes affaires. 

Vous savez que le Parisien a toujours son béret, sa moustache et sa baguette sous le bras ?

Mais bien sûr, on se hâte à caresser le poil du touriste dans le bon sens, pour le complaire dans ce qu’il a en tête, histoire de lui vendre ce qu’il recherche !

 

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Les photos de couvertures de guide sont en général d'une originalité à défoncer des portes ouvertes.

Le Big Ben figure en bonne place sur ceux de Londres, et sur celui de Moscou, le Kremlin se succède à lui même d'année en année comme on bon vieux temps du communiste ou la constance et la persévérance étaient gages de qualité. Un taureau venait régulièrement se promener en couverture du guide d'Espagne dans les années 60 et 70, mais la tauromachie étant ces derniers temps devenu socialement incorrect, notre bovidé a préféré se faire la malle laissant le rôle souvent à une danseuse de flamenco.

Quant au Parc Guell, il fait souvent sa vedette sur l'édition de Barcelone quand la Sagrada Familia part en vacances ! Guaudi est à la mode.

Bref, vous aurez compris, on nous gave de photos plus indigestes les unes que les autres.

L'éternelle gondole de Venise hante mes rêves les plus cauchemardesques et si elle a en plus l'idée de poser devant la place Saint Marc, on frôle le retour de Freddy. Le guide du Routard vient de réaliser donc une fois de plus mon cauchemar pour l'édition sur la cité des Doges 2017. 

Un tel choix dans les photos prouvent certainement la passion que les maquettistes des éditions ont pour leur travail et reflète au premier coup d'oeil le sérieux de toute l'équipe, assurant que le texte et les infos figurant à l'intérieur tiendront le niveau reflété par la couverture.

Une fois admise cette constatation, on ne peut plus du tout être déçu par un guide, on peut tout au plus développé en soi un niveau d'indulgence que le Pape lui même n'a pu jusqu'alors atteindre. Le pardon existe !

Donc si Venise se résume à une la gondole lâchement abandonnée face à la Place Saint Marc ou des amoureux se bécotent en prologue à leur lune de miel, alors je comprends mieux pourquoi on nous sert en permanence une Boca infestée de couples indécents s'enlaçant charnellement à tous les coins de rues, sous les yeux habitués des vieux pêcheurs d'origine italienne assis sous un vieux réverbère, fumant leur pipes, et se délectant libidineusement du spectacle tout en ne perdant pas une seconde la retransmission d'un match de foot beuglant d'un vieux transistor.

On entre dans du grand délire !  

 

 

Voilà donc en accompagnement, et pour appuyer mes dires, espérant ainsi que je ne sois pas le seul à avoir une indigestion ce soir, quelques exemples de couvertures ou le déferlement de couples atteint sont paroxisme dans le Caminito. L'invasion Alien n'est rien en comparaison.

Le Caminito c'est le tango, le tango c'est Buenos Aires et donc Buenos Aires c'est forcement le Caminito. On a fait le tour du problème, et si vous en doutez encore je vous ressortirai dans un autre article encore une bonne quinzaine de couvertures de guide avec du beau linge bien humide tendu entre deux fenêtres bariolées qui s'égoutte sur un couple de danseurs en plein ébat nuptial. 

Couleurs saturées avec du photoshop, une débauche de clichés identiques, une agression de vos yeux, un matraquage et un abrutissement de votre cerveau. On devient de vrais légumes ! De la bave vous en sortirez presque de la bouche après autant de violence ! En un mot vous êtes "sonnés"

Ne vous étonnez donc pas que subliminalement vous êtes déjà programmés pour suivre les hordes de touristes débarqués en ville, et qui ne pouvant plus raisonner par eux même, ne suivent qu'une seule obsession : Voir aussi le Caminito. Que dis-je "voir" ? A ce niveau là c'est plutôt "faire" le Caminito, comme on "fait" la guerre ou comme on "fait" l'amour.

Vous êtes aveuglés, vous êtes sous emprise, vous n'êtes plus vous même. Une force surnaturelle vous force malgré vous à vouloir absolument y aller.

D'ailleurs les touristes que je croise me le disent bien, "Boca ne m'intéresse pas, mais je veux y aller tout de même pour voir". Lisieux, Fatima, Lourdes et maintenant .... le Caminito, vous êtes devenus des croyants et vous aussi vous voulez voir ! alléluia !

 

Voulez vous une preuve de votre aveuglement déjà installé ?

Avez vous remarquez qu'il y a deux fois la même photo ? Cherchez ! 

Les guides se piquent même les photos entre eux ! En haut "Le Routard de 2016", et en bas le "Eyewitness Buenos Aires 2013".

A ce petit jeu c'est le Routard le copieur puisque son édition date de 3 ans plus tard !

La photo est juste inversée, peut être même à propos. Une photo inversée est peut être considérée comme différente (ou retravaillée), histoire de ne pas payer de droits ?

Si le texte du guide du Routard pouvait aussi être retravaillé, ça serait tout de même plus gratifiant ! 

 

 

A 12.000 km de la FNAC où vous avez trouvé le guide qui vous explique comment passer vos vacances (là encore, on vous a lobotomisé), vous descendez du bus à La Boca, et vous vous mettez à la recherche du « cliché de la couverture » que vous avez encore en main. Vous n’allez pas attendre longtemps, les danseurs sont là !

Ils vous attendent pour prendre la pose, mettent un chapeau sur votre tête contre un billet dans leur poche, et le Caminito fraîchement peint (chaque année au moins une fois) sera en plus le doux décors à une flopée de selfies endiablés que vous enverrez de suite à vos amis « baguettes sous le bras » laissés au « pays du fromage qui pue» pour bien montrer que vous y êtes et que vous aussi vous êtes un tangero aventurier !

Mais non, vous allez me dire, « fo pas prendre tou tro serieu, koa ! », « Oai c’est clair ! C’est trop mignon après tout le Caminito qu’avec la couleur que ça pète bien dans ma selfie ! »

Ben tiens, un passage dans le Caminito, 3 merdouilles achetées aux « artisans » bloquant les trottoirs, et à la rigueur une bière à la terrasse d’un bar « typique » puisqu’on « était même avec des locaux » (pour preuve que vous connaissez bien les endroits recommandés par les mêmes guides).

Vous êtes devenus en quelques minutes les sages de la Boca, les détenteurs de la vérité "Xeneize". Rien ne vous échappe plus, une photo avec le sosie de Maradona, une autre avec la statue du pape, et celle d'Eva Peron qui salue la foule du balcon, vous pensez être original en la cadrant avec votre Minolta, mais des millions d'autres ont pensé être aussi les seuls à avoir eu cette idée avant vous !   

Eh bien, tout ça m’énerve (comme disait Fritz), ça manque d’originalité.

Ok on vient donc en pèlerinage dans la chapelle à partager entre tango et Saint Maradona, mais tout de même, autant de pékins sur si peu de m2 a rechercher la "vérité" ça défriserait un mamouth !

Calmez vous, installez vous sur un banc tranquillement devant le Caminito, et vous voyez passer en accéléré les touristes prendre les mêmes poses, faire les même clichés, dire la même chose avec le même vocabulaire, trouver joli ce que tout le monde trouve joli, s’esclaffer au même endroit devant le même élément …. La tête tourne.

Touche « pause » à enclencher ! Levez vous, déplacez vous à un bloc de là où il y a des habitants, des vrais, des qui « font » la Boca 24h sur 24h, ils y vivent, rigolent peut être un peu moins et le tango ils ne l'ont jamais fait. On est loin de l'Usine à touristes ! 

Le Boca c’est peut être autre chose après tout !

 Photo : L'Usine à touristes. 

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- Le quartier de San Telmo (Avril 2014).

- Le quartier de San Nicolas (Mai 2014).

 

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