Mise à jour : 02 juillet 2011.

Le Guide Michelin Argentine enfin mon rêve ?

Je me réjouissais à l’avance de recevoir la première édition du Guide Michelin Argentine tout juste paru en France (et encore indisponible en Argentine). Le Michelin auréolé d’un savoir faire professionnel que personne ne conteste, surement l’un des premier guide au Monde pour sa qualité de ses éditions vertes que de nombreux collectionneurs s’arrachent dès qu’elles ont une bonne vingtaine d’année. Me viennent à l’esprit aussi ces quelques exemplaires encore existants de la toute première édition France de l’année 1900 que possèdent quelques chanceux fortunés, et que je n’aurai peut être jamais la chance ne serait ce que de le feuilleter.

Voilà que le Michelin après avoir sillonner les routes de France, d’Europe, du bassin méditerranéen, débarque au sud du nouveau continent.

Enfin un vrai professionnel sur le terrain, le guide Michelin va enfin révolutionner les guides francophones sur le pays, donner un grand coup de balai aux Routard, Futé, Lonely et Geo ! Peut être même les ridiculiser, les envoyer d’un seul coup d’une premier édition au pays de la ringardise. Je pensais enfin que les derniers jours des guides bidons qui passent d’une édition à une autre en faisant du « copier-coller », et en répercutant d’une année à l’autre les mêmes clichés totalement surfaits (style : le pays de la meilleure viande du monde, le pays de la liberté du gaucho, de la ferveur inégalée dans le football, de la Santa Evita et du tango de Gardel) aller voler en éclat !  Une sorte de révolution dans la manière de présenter le pays aux francophones avides d’entrer dans la réalité de 2011 d’un pays fabuleusement complexe et passionnant.

J’imaginais la stratégie d’un énorme groupe puissant comme le Michelin, envoyant une vingtaine de professionnels du voyage dans les 24 provinces du pays pour nous dénicher, les lacs, rivières, les parcs et les curiosités les plus époustouflants, des anecdotes des plus intéressantes, des hôtels les plus originaux, bref « algo para soñar » « para despegarse del piso », « para vibrar con la mente y el corazón ».

C’est un peu comme si Ferrari nous dévoilait son dernière modèle, encore caché par un voile, la presse et les photographes sont là aux aguets prêts à déclencher leurs appareils à l’instant magique où les deux superbes blondes vont tirés le voile pour dévoiler au monde entier LA meilleure machine du siècle !!!

 Et là, tout bascule, personne ne comprend rien, sous le voile apparaît un moulin à café !

Tout bascule en enfer !

Monsieur Michelin, que se passe-t-il ? Toi qui es le meilleur, tu as sorti non pas un guide mais un texte digne d’une fête scolaire de fin d’année. Ce n’est pas que tu te sois trompé quelques fois sur des sujets ou des indications (tout le monde en fait), mais cette fois ci, tu as fais du vite-facile-cliché que même des stagiaires ne font plus depuis le collège.

Ce n’est pas possible, je dois rêver, un cauchemar, Michelin tomber si bas ?

Je dois l’admettre, voilà 72h que je le parcours en long en large et en travers, le Michelin est même plus mauvais que le Routard (c’est pour vous dire !).

Si je devais donner une note aux 5 guides francophones existants aujourd’hui sur le marché, je mettrai : Géo : 8/20, Lonely : 7/20, Petit Fute : 5/20, Le Routard : 4/20, et le Michelin : 3/20.

Ce n’est pas nul, c’est catastrophique !

Vous me connaissez, je n’ai ni ma langue dans la poche, ni même l’habitude de faire des déclarations sans les appuyer d’exemples, alors je vais vous en donner quelques uns !

Ma première impression est que le Michelin n’a envoyé personne en Argentine pour monter le guide, tout s’est passé par internet et concocté à Paris dans les bureaux de l’avenue de Breteuil. L’édition est sortie de presse en Italie en janvier 2011 et se dénomme modestement « Edition 2011 ». En fait toute l’information date de juillet - novembre 2009 (99% quelques rajouts en 2010, juste avant de lancer l’impression). D’ailleurs j’ai retrouvé de ci de là quelques reprises du « Petit Hergé de 2009 ». (Ca n’arrive même pas à me flatter). Si Michelin a tout de même envoyé une personne, celle ci a du vivre son déplacement comme un loisir plus qu'un voyage à mission professionelle.

 

Le guide est decoupé en 3 partie :

Comment organiser son voyage : Page 1 à 45. (Je note 4/20)

Ne soyons donc pas méchant et ne comparons pas les écrits du Michelin avec ce qu’il se passe aujourd’hui mais uniquement avec l’époque de 2009.

 

Exemple : Dans Ou se restaurer (page 21) : je cite «  … l’Argentine n’est pas reconnue pour ses traditions culinaires. La « gastronomie locale » se résume en fait à des grillades et à des plats d’origine étrangère, principalement issus de la cuisine espagnole et italienne, voir d’autres pays d’Amérique du sud … »

Je répondrai donc à monsieur Michelin la prochaine fois qu’il remettra les pieds à Buenos Aires (ou qu’il les mettra pour la première fois) qu’il aille s’acheter le guide Vidal Buzzi (moins cher que le votre) qui depuis 1994 (et dont le grand modèle à l’époque fut le guide rouge Michelin) nomme, et note les meilleurs tables de Buenos Aires (uniquement Buenos Aires) tous les ans. Il doit y avoir 500 restaurants jouant tous les ans leurs réputations.

Quant à savoir ce qu’est la « Gastronomie locale » sachez que la Cuisine argentine (surement moins fine que la française) est tout de même variée quand on se donne la peine de la chercher (C’est justement votre métier non ?).

Il existe donc (et ce n’est pas moi qui les nomme de cette manière, mais les professionnels de la gastronomie) des différentes cuisines argentines que l’on différencie en : Argentine traditionnelle, Argentine moderne, Casera (maison), Creativa, Criolla, De Autor, Eclectica, Fusion, Hispano-Argentine, Italo-Argentine, Argentine Juive, Macrobiotique, Marisqueria, Natural, Naturista, Parilla (la seule selon vous qui existe), Porteña Moderne, Porteña Clasica et la végétarienne.

Ce n’est quand même pas à moi pauvre Petit Hergé d'apprendre au grand Michelin ce qu’est la cuisine non ?

De plus si vous vous étiez donné la peine de sortir de Buenos Aires pour aller parcourir les 23 autres provinces vous auriez pu constater que dans les provinces on mange différemment, du Yacare (alligator) à Entre Rios, énormément de poisson du rio à Misiones et à Corrientes comme le Pacu, Surubi, et autre Boga. En Patagonie, du mouton, de l’agneau à toutes les sauces, dans le nord ouest, le maïs décliné de cent façons différentes. (Peut être est ce les plats « d’autres pays d’Amérique du sud » dont vous parlez), une confusion qu’un enfant de 10 ans ne ferait pas, pensant peut etre que Jujuy, Tucuman et Salta font déjà parties de la Bolivie ? Non non, la cuisine norteña est bien réelle et 100% argentine !

 

D’autres exemples à la volée :

Page 22 : « Il n’est pas coutume de marchander… » Ah Bon ? Mais si justement c’est le pays ou l’on doit marchander le plus… du prix d’un hôtel, à un pull ou une paire de chaussure dans un magasin, jusqu’à un réfrigérateur, ordinateur portable et téléviseur (comme je l’ai toujours fait). Même dans les enseignes les plus connus, le marchandage se fait (et se doit d’être fait !).

 

Quelques inexactitudes ensuite parce que le guide date de 2009, mais pourtant importantes à mentionner, par exemple, on nous parle d’une taxe de sortie du pays (qui n’existe plus depuis 2009), le guide annonce 24 USD. C’est faux, la taxe valait 18 USD.

Pour les locations de voiture, Michelin annonce qu’il faut avoir 21 ans, c’est faux, il faut depuis début 2010 (il y a un an et demi), avoir plus de 18 ans. Dans le chapitre taxi, il y a une confusion que le Michelin n’a pas saisie. Pour Buenos Aires, les taxis sont essentiellement utilisés intramuros (et Ezeiza), alors que les remises sont utilisés essentiellement en banlieue. (Et non « Remises » qui signifient pour Michelin des taxis privés !).

Parler uniquement de San Telmo comme lieu de la brocante, c’est aussi un peu fort….. et le marché aux puces de Colegiales ? (Mercado de pulgas). C’est un peu comme si on oubliait de parler des puces de la porte de Clignancourt.

 

Comprendre l’Argentine : Chapitre 2 : Page 46 à 101 (Note 12/20)

Cette fois ci, on sent que ce chapitre a été confié à une personne qui en connaît un peu plus sur le pays, donc pas évident en 50 pages de résumer un pays et son histoire, mais si il y a un seul point positif à ce guide, c’est justement ce chapitre. On tombe quelque fois dans le cliché, mais difficile de ne pas le faire quand on fait un tour d’horizon en si peu de pages.

Quand on atteint le pire :

Découvrir l’Argentine : Chapitre 3. Page 102 à 491. C’est là où ça se gâte sur 390 pages ! (Note 2/20).

On le ressent dès la carte du pays qui se trouve à l’intérieur de la couverture, puisque son nommées les « 6 régions de l’Argentine »… perdues chacune à une extrémité du pays sans se toucher. (Pendant que j’y suis sur la carte, la province de Mendoza se fait appeler Province de San Luis !).

Ce n’est pas « Découvrir l’Argentine », mais découvrir 10 villes ou villages d’Argentine.

Le Michelin a du traiter à peine 5% du pays….. pire que ces concurrents.

A)      Buenos Aires pages 102 à 183. (21%)

B)      Iguazu pages 184 à 213 (7%)

C)      Salta et Jujuy pages 214 à 293 (20%)

D)      Mendoza et San Juan 294 à 343 (13%)

E)      Patagonie 344 à 469 (33%)

F)      Ushuaia de 470 à 491 (6%)

(En % la proportion du secteur par rapport à l’ensemble du chapitre).

 

Par exemple Buenos Aires :

11 pages de cartes et uniquement 32 pages de texte.

Les quartiers qui sont (mal) traités sont :

Le Micro centre – plaza de Mayo – Tribunales (11 Pages de texte), Puerto Madero (4 pages), San Telmo (2 pages), La Boca (2 pages), Retiro (2 pages), Recoleta (5 pages), Palermo (5 pages), Belgrano (1 page).  

Aucune ligne sur : (je nomme uniquement les quartiers ayant un intérêt touristique et commercial)

Abasto, Almagro, Chacarita, Caballito, Colegiales, Villa Crespo, Boedo, Parque Centenario, Flores, Mataderos, Once, Belgrano R.

Seulement 32 pauvres pages uniques pour raconter Buenos Aires ! Viennent ensuite 26 pages de Publi-Information (aller manger là et aller dormir là). 26 Hôtels (Enormément de copinage) qui ne servent à rien, quand on voit qu’on « recommande » le Hilton, ou le Faena ! On se demande alors pourquoi ne figure pas non plus le Sofitel, le Marriott, le Caesar Park, le Haytt, ou le Four Seasons !!!! Franchement, acheter le Michelin pour apprendre qu'à Buenos Aires, il faut aller au Hilton, c'est tres fort !!! 

Bref vous aurez compris, 4 hostels miteux à San Telmo, 2 ou 3 anciens hôtels décadents de l’avenida de Mayo et 2 « 5**** Etoiles» de Puerto Madero, c’est là le choix du MICHELIN ! Bravo !!!!

Quant aux tables….. 25 restaurants pour tout Buenos Aires, fabuleux ! On mentionne par exemple le restaurant du musée d’art moderne Malba ! Quelle bonne idée, au prix du café totalement quelconque, vous pourriez surement vous payer un plat dans un « resto normal ».

C’est du foutage de gueule (il n’y a pas d’autre mot venant pour qualifier le travail d'un professionnel comme le Michelin).

Et le reste du pays ?

Pour le reste de la province de Buenos Aires … y compris la banlieue : Michelin ne traite que Tigre et San Antonio de Areco !

Exit les autres destinations intéressantes de la banlieue comme San Isidro, La Plata. Lujan, etc…

Quant au reste de la province de Buenos Aires (grande comme la superficie de l’Italie) à se demander si elle existe encore ?

Dans le Michelin il n’y en a aucune……NEANT ! (Pas une ligne) ……………….

Pourtant : La Sierra de la Ventana, Mar del Plata, Azul, Bahia Blanca, Balcarce, Campana,  Carhue, Carmen de Patagones, Chascomus, Claromeco, Dolores, General Belgrano, Junin, Lobos, Miramar, Necochea, San Nicolas de los Arroyos, Tandil.

Toutes ces villes et villages sont des destinations touristiques.

J'imagine déjà Michelin se défendant en avançant l’explication que dans un seul guide de 500 pages, on ne peut pas aborder toutes les destinations …..

Si, si, ca peut très bien se faire en écrivant ne serait ce que 4 ou 5 lignes à chaque fois !

Je vous ferez grâce de toutes les autres provinces du pays, mais sachez que dans le Michelin :

Concernant :

-          La province de Cordoba : NEANT ! (pas une ligne) donc ville de Córdoba, la sierra, Alta Gracia ou encore les estancias jésuites classées par l’UNESCO, ne font pas parties des endroits intéressants à visiter.

-          La province de Santa Fe : NEANT ! (pas une ligne) Ville de Rosario out !

-          La province de Entre Rios : NEANT ! (pas une ligne) Gualeguaychu et son carnaval, ou le parc national el Palmar passent à la trappe.

-          La province de Corrientes : NEANT ! (pas une ligne) Tant pis pour Estero de Ibera, Mercedes, Itati, et les rios.

-          La province de Formosa : NEANT ! (pas une ligne).

-          La province du Chaco : NEANT ! (pas une ligne).

-          La Province de Santiago del Estero : NEANT ! (pas une ligne).

-          La province de la Pampa : NEANT ! (pas une ligne).

-          La Province de San Luis : NEANT ! (pas une ligne).

-          La Province de Catamarca : NEANT ! (pas une ligne).

Que dire de plus en conclusion ?

Le Michelin Argentine, ce n’est ni un guide vert sur l’Argentine, encore moins un guide rouge Michelin. Je me demande ce que c’est ?

Bibendum s’est fait abuser de la part de l’équipe qui a eu la responsabilité de monter ce torchon. Professionnalisme ZERO, sérieux ZERO, Résultat ZERO.

A lire dans le Petit Herge :

- Les guides d'Argentine.(Septembre 2006).

- Les revues argentines.(Septembre 2006).

- Tout ce qu'il faut savoir avant de partir en Argentine.(Juin 2010).

- Tout ce qu'il faut savoir en arrivant à l'aéroport d'Ezeiza.(Mai 2011).

- Tout ce qu'il faut savoir quand on arrive à Buenos Aires.(Mai 2011).

- Les spectacles de tango à Buenos Aires.(Mars 2011).

- Le cimetière de Chacarita à Buenos Aires.(Septembre 2010).

- La Confiteria Las Violetas à Buenos Aires.(Septembre 2010).

Photo : Le Theatre de Gualeguaychu dans la province de Entre Rios.

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