Les derniers jours du gouvernement Kirchner ?
26 mars 2008
Il n’aura fallu qu’un peu plus de 4 mois pour que les argentins descendent dans la rue pour manifester contre Cristina Kirchner.
Les faits : Voilà maintenant près de 2 semaines que le « campo » (le monde agricole) argentin est en grève. Les vaches ne vont plus à l’abattoir, il n’y a que très peu de ramassage de lait, etc…. Pourquoi ? Parce que depuis maintenant près de 5 ans, le gouvernement de Nestor Kirchner et maintenant de son épouse taxe les producteurs d’une manière totalement absurde et congèle les prix à l’achat de toute la production agricole. A première vue, vouloir congeler les prix à l’achat parait une bonne mesure en pensant qu’ainsi le consommateur en bout de la chaîne va acheter son « bife de lomo » à la boucherie au même prix. Mais voilà que d’une part la viande n’a cessé d’augmenter (comme tout d’ailleurs), aux environs de 40% en 1 an. (Le lait et les produits dérivés ont quant à eux subit des augmentations de près de 60% en 1 an), et d’autre part tous les prix des produits dont nécessitent les agriculteurs ont aussi augmenté dans les mêmes proportions. (Engrais, pièces mécanique de matériel, salaires des employés, etc.…) Lire article sur la crise du lait. |
Il ne peut pas vendre au prix qu’il désire, les exportations agricoles sont même lourdement taxées (un comble, quand on sait qu’en Europe ce sont les gouvernement qui aident la production et surtout les exportations). On taxe ici les exportations car le gouvernement pense (bêtement) que si il y a moins d’exportation, il y aura plus de produits pour le consommateur argentin et que les prix baisseront. En fait ce qu’il se passe, c’est que la production baisse de manière importante en raison des lourdes taxations et du manque de rentabilité et de ce fait il y a chaque fois moins de productions et les prix continuent à augmenter. Quant on produisait autrefois 100, on exportait 60 et on consommait 40 en Argentine. Aujourd’hui on produit 80, on exporte 50, et on consomme 30 en Argentine…. Alors bien sur les prix continuent à monter ! Pire que ça, les agriculteurs en produisant 100 gagnaient de l’argent, aujourd’hui ils produisent 80, leurs exploitations ne sont plus rentables. Donc baisse de la consommation dans toutes les zones rurales d’Argentine en commençant par toutes les zones à forte activité agricole : Provinces de Buenos Aires, Cordoba, Santa Fe, Entre Rios. Le monde rural est maintenant entièrement contre Cristina Kircher.
Ce qu’il s’est passé hier (mardi 25 mars 2008) : La situation est bloquée, les agriculteurs coupent les routes et empêchent tout camion chargé d’aliments de passer les barrages pour faire pression sur le gouvernement afin qu’il revienne sur sa décision de nouvelle augmentation de taxe sur leurs productions. Pendant toute la journée, on attend une réaction et un discours de Cristina Kircher (qui n’a pas une seule fois en 2 semaines rencontré les syndicats agricoles, et qui refuse toute négociation). A 18h00, Cristina Kirchner prend la parole à la Casa Rosada devant les journalistes et les membres de son gouvernement. Tout le monde espère alors un geste de sa part pour apaiser le monde rural. Bien au contraire, elle sort quelques phrases incendiaires contre les campesinos, je cite : « Je ne me soumettrai à aucune extorsion » « Il s’agit de grevistes de la richesse » (Son piquetes de la abundancia)
Stratégie de Cristina Kirchner (Si il y en a une !) : Faire passer le message : « Les agriculteurs sont tous des nantis, ils prennent en otages le reste des argentins en bloquant les routes. Le monde rural est riche et doit aider les pauvres en étant plus taxé que les autres ». En fait elle veut faire passer tous les agriculteurs pour de riches estancieros, quant on sait que ceux-ci ne représentent qu’une infime proportion du monde rural argentin. |
Il ne s’y retrouve plus, les prix augmentent de 40% en 1 an, son salaire augmente quant à lui de 10%, mais comme le gouvernement truque les chiffres de l’inflation à 8%, les Kirchner poussent le bouchon jusqu’à répéter à longueur de discours que l’argentin a donc gagné en pouvoir d’achat. (10%-8% = 2% d’amélioration pour les ménages). Lire article sur l'INDEC et l'hyperinflation. Les argentins, toutes classes sociales confondues, en ont assez de ce discours et détestent l’hypocrisie de Cristina Kirchner.
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Dès la fin du discours de Cristina Kirchner, pour la première fois depuis la crise de 2001-2002. Les argentins de la classe moyenne de Buenos Aires sont sortis dans la rue avec les casseroles pour montrer leur désapprobation contre la politique agricole du gouvernement mais aussi pour montrer un « ras le bol » contre l’inflation, contre le flou économique, contre une ambiance de mensonge envers la population.
La lutte qui la semaine dernière concernait uniquement le monde rurale et leurs problèmes sont entrain de déborder socialement sur tous les secteurs de la population. Cristina Kirchner n’a pas senti venir le ras le bol et les tensions sous-jacentes qui existaient déjà depuis quelques mois dans la population (y compris celle des villes). Je pense qu’elle n’a plus aucune prise sur la situation et que son gouvernement va rapidement s’effondrer dans les prochains jours.
Vidéo amateur tournée hier soir (mardi 25 mars 2008) |
La cerise sur le gâteau :
Vers 23h, alors que depuis plus 3 heures les manifestants contre Cristina Kirchner occupaient la zone de Plaza de Mayo, diagonal Norte, Avenida de Mayo. Celle-ci n’a pas envoyé la police pour « rétablir l’ordre » mais ses milices. On les appelle les « piqueteros K », en fait ce sont des hommes de main mafieux, avec en tête D’Elia, qui intervient lorsque le clan Kirchner a besoin d’eux. C’était le cas hier. Pas l’ombre d’un policier de la Police fédérale hier soir dans le centre, les piqueteros K avaient ordre de taper sur les manifestants. Sur les photos que vous pouvez voir dans la presse (même européenne), ce sont ceux là qui tabassent du « ruralista » en toute impunité. |
Voilà un long article, mais la situation en moins de 24h a totalement basculé, et ce soir même (26 mars 2008), on attend à nouveau des manifestations à Buenos Aires mais aussi dans les grandes villes comme dans les villages. Certaines routes des provinces de Buenos Aires, Entre Rios, Santa Fe sont coupées aux camions alimentaires.
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