Mise à jour : 25 avril 2012.

Galeria Güemes (1915) :

L’édifice Güemes à Buenos Aires, abritant au rez-de-chaussée la Galeria Güemes, est un des premier gratte-ciel de Buenos Aires. Première construction entièrement montée en béton armé dans la ville. L’ensemble fut dessiné et conçu en 1912, commencé en 1913 et inauguré en 1915. Ce bâtiment occupe une parcelle dans le micro centre comprise entre les rues Florida et San Martin qui sont reliées par cette galerie longue de 116 m ouvrant sur ces deux rues. Entièrement rénovée en 2007, c’est une des curiosités à découvrir lors de votre passage à Buenos Aires. Si la galerie n’occupe qu’une infime partie du bâtiment haut de 87 m, au fil des années, on a pris l’habitude de nommer l’ensemble «  Galeria Guemes » plus que « Edificio Guemes ».

nullCalle Florida, la rue du commerce :

 

Depuis le milieu du XIXème siècle, la calle Florida était déjà devenue la rue la plus prisée de la ville, la rue comptant le plus de boutiques et surtout la plus animée du matin au soir par une foule porteña ou se mélangent les employés, commerçants et clients toujours avides de nouveautés. En 1912, l’Avenida de Mayo est déjà terminée et s’est transformée en Champs Elysée de Buenos Aires, où s’alignent les hôtels élégants et las bars les plus en vogue, mais la calle Florida reste encore le lieu du commerce, on y trouve les meilleurs boutiques de mode, la dernière mode, les sièges des journaux, les banques et les « grands magasins ». Les terrains sont recherchés et les petites maisons de plein pied ou possédant une seul étage sont rasées peu à peu pour les remplacer par des immeubles plus haussmanniens.

Photo : Dans les années 1920, la calle San Martin toute autant noire de monde que la Calle Florida. A droite l'entrée de la Galeria Güemes. Panneau pour le "Teatro Florida" "Revista et Genero Alegre"(Revue et genre leger) rajoute l'annonce. En façade la "Farmacia Galeria Guemes"(Aujourd'hui disparue).

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Photos : Façade sur la calle Florida, à gauche photo de 1935. Au loin l'edificio SAFICO sur l'Avenida Corrientes. A l'époque on ne parle pas de Galeria Güemes mais de Pasaje Güemes. A droite, photo actuelle, presque même angle. La façade sur la calle Florida a été ravagée par un incendie en 1971, et n'a pas été reconstruite à l'identique. Cliquez sur les deux photos pour les agrandir.

nullLe projet :

1910 : Sur la rue San Martin, au 74, un terrain à vendre (20 m de façade et 58 m de profondeur). C’est le Banco Supervielle qui l’achète. On démolie la vielle maison et on entreprend les travaux pour monter un immeuble abritant une agence de cette banque et une petite galerie marchande. Au même moment la parcelle la touchant et donnant sur la calle Florida (au 150) est aussi à vendre (29 m de façade et 58 m de profondeur), un riche homme d’affaire et politique de Salta, ancien gouverneur et sénateur de la province,  David Ovejero Gonzalez se porte acquéreur de cette parcelle avec l’aide d’un autre salteño Emilio San Miguel. Ils arrivent aussi à se porter acquéreur du chantier à peine commencé de la calle San Martin (avec l’approbation du Banco Supervielle) et fond arrêter de suite les travaux.

1911 : L’ancienne maison à étage occupant la parcelle de la calle Florida est démolie, et les deux propriétaires salteños lancent avec le soutien de la Banque Supervielle, un concours international pour construire sur les deux parcelles le plus haut bâtiment de la ville, le premier gratte-ciel argentin.

1912 : En septembre, les propriétaires choisissent le projet gagnant, il s’agit de celui de l’architecte italien Francesco Giannotti, un turinois installé à Buenos Aires depuis 1911 et connu comme un des meilleurs architectes du style Art Nouveau que compte la ville. Il était venu une première fois à Buenos Aires en 1909, pour le montage du pavillon de l’Italie à l’Expo International du Centenaire en 1910, puis été repartie en Italie, avant de revenir définitivement en 1911 pour préparer ce concours de la Galeria Güemes ainsi que le projet de la Confiteria Molino sur la Plaza Congreso. Son atelier était installé sur la calle Parana au 972. Il devint rapidement l’architecte préféré de David Ovejero Gonzalez, ce qui lui permit de travailler à cette époque sur de nombreux projets à Salta comme le Mercado Central et l’actuel Museo de Ciencias Naturales.

nullLe projet prévoit deux façades, une sur la calle San Martin (alors nommée calle Catedral), et une autre la plus importante, imposante et aussi la plus haute sur la calle Florida. Le sommet de l’édifice trône par un phare à 80 m au dessus du niveau de la rue, et la galerie joignant les deux rues permet d’accéder à 4 blocs d’escaliers et ascenseurs qui délimitent les 4 bâtiments qui composent l’ensemble. (2 sur Florida hauts de 14 étages et 2 sur San Martin). Les ascenseurs sont d’ailleurs les plus rapides de Buenos Aires (2 m 50 à la seconde). La municipalité de Buenos Aires ferment les yeux sur quelques irrégularité du plan d’occupation du sol et des normes, puisqu’il n’était pas permis de construire si haut sur la calle Florida et de plus sur ses 3 sous-sols, l’ensemble abrite un théâtre, alors qu’il était interdit de construire des salles de spectacle en sous sol.

Au total l’immeuble compte 350 bureaux mais aussi 70 appartements luxueux (dont un fut occupé par Antoine de Saint-Exupéry), deux restaurants (un au rez-de-chaussée et un autre au 14ème et dernier étage). Au sous sol, un dancing qui se transforme en Théâtre, un salon de coiffure, et des confiterias. Dans la galerie en face des quatre blocs d’entrées, deux halls de 20 m de diamètre surmontés de coupoles illuminées. Dans le reste de la galerie, 36 boutiques toutes avec des vitrines entourées d’encadrements en bronze doré. 26.500 m2 à vendre ou à louer, un monstre pour l’époque !

Dessin du haut : Façade sur la calle Florida, dessin de 1917.

Photo à gauche : Entrée du bloc ascenseur San Martin donnant dans la Galerie de nos jours.

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Photos : A droite, La façade sur Florida en regardant vers le sud en 1915. A droite la même façade en regardant toujours vers le sud au niveau de la rue. Publicité pour la Casa Tow, et pour le Teatro Florida. Au fond la Banque de Boston. Cliquez sur les photos pour agrandir.

nullConstruction et inauguration :

1913 : Premier coup de pioche le 10 mars. Le chantier est rapide et ne dure que 32 mois, malgré tout de même quelques retards, dus à la première guerre mondiale qui se déclenche en Europe. La plupart des matériaux de décoration provenant de l’Ancien Monde, se font quelquefois attendre plus que prévu, les liaisons maritimes se faisant dangereuses. C’est ainsi que le navire italien apportant le marbre pour la façade de la calle Florida fut coulé dans l’Atlantique par un sous marin allemand. Le cout de la construction dépasse ce qui était prévu (10 millions) et atteint 15 millions de pesos.

1915 : Le décembre, est inauguré l’Edificio Güemes et sa galerie. Il porte le nom de ce général en souvenir à sa lutte menée à Salta contre les troupes espagnoles pendant les guerres d’indépendance. Les petits fils de ce général furent invités à l’inauguration ainsi que le président de la Nation, Victorino de la Plaza ; et le maire de Buenos Aires, le Docteur Gramajo, entre autres.

 

Photo : La Galeria Güemes en 1927. Au fond la calle Florida. Il n'y a pas encore de stand au milieu du passage. Même état qu'en 1915.

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Photos : A droite, la Galerie dans les années 1930, le centre de la galerie est deja occupé par des stands. Ceux ci appartiennet aux magasins "Casa Town". Au fond la sortie de la galerie vers la calle San Martin. Sur le coté droit l'entrée du Teatro Florida. A gauche, photo actuelle de la même galerie en regardant vers la sortie Calle Florida. Le sol a changé et les stands ont été modernisés. Cliquez sur les photos pour les agrandir.

nullLa vie de la Galeria de 1915 à 2012 :

1917 : Dans le Théâtre du sous sol, nommé « Teatro Florida » le 27 février, Carlos Gardel vient chanter. Cette salle de  théâtre a toujours présenté des spectacles populaires, on l’appelait un « Burlesque » (en français), chanteur, acteur, attraction, numéro de clown, contorsionnistes, etc… Pas souvent très fins ni intello, au public largement masculin. Une des « vedettes » de l’époque fut « Moira Star » qui n’hésitait pas user de ses charmes et à sortir dans la galerie pour attirer le spectateur ! Pepe Biondi (comique et acrobate argentin) y a fait ses débuts dans les années 30.

1917 : Toujours en 1917, Bonafide (entreprise de café qui existe toujours) installe une boutique dans la galerie dans laquelle on vend du café et où le public peut venir voir la torréfaction. Le succès est au rendez vous, le local s’agrandit et on y ajoute la vente de bombons et autres caramels.

1924 : Ouverture du Bar Boston City dans la galerie, en référence à la Banque de Boston installée la même année a une cadra de la Galeria Guemes, à l’angle de Diagonal Norte et de Florida. Le bar n’est ouvert alors qu’aux hommes. C’est l’endroit incontournable et chic des hommes d’affaire de la city.

1928 : Le bâtiment est acquis en majorité par Martin Tow qui était propriétaire d’un des grands magasins de vêtements pour homme à Buenos Aires, la « Casa Town ».

null1929 : Antoine de Saint-Exupery s’installe pour vivre dans un appartement du 6ème étage. Il y restera deux ans, jusqu’au debut 1931. Il va y écrire « vol de nuit ».

1932 : Installation de Sellos Policella, qui fabriquait des timbres caoutchouc. C’est la société qui est installée sans interruption depuis le plus longtemps aujourd’hui dans la galerie. Aujourd’hui le local se nomme Casa Policella situé au milieu de la galerie dans un stand (stand 6). Il continue à vendre des timbres caoutchouc…..

1950 : Ouverture dans la galerie de la parfumerie « Ruiz y Roca », Helen préparait sur mesure les parfums à ces clients. C’est une des meilleures parfumeries de la ville. D’autres viennent s’y installer, et la Galeria Guëmes est surnommée « La Galeria de los perfumes ». 

 

null1964 : Le dessinateur et peintre Juan Lamela installe son atelier dans un bureau du 14ème étage et va y dessiner les plus belles planches d’illustration du « Martin Fierro ».

1966 : Installation de la Cigarerria Ko’ E’ Yu. Une institution toujours debout, on y vend les meilleurs cigares de la ville (ils le disent !). Toujours au milieu de la Galerie au stand 10.

1971 : Le 10 septembre, un incendie se propage à partir de la boutique de chemise « El Cisne » donnant sur la calle Florida et se propage à toute la façade, détruisant toute la décoration d’origine de celle-ci. La reconstruction n’est pas une des plus réussies (normal nous sommes dans les années 70). Façade dite « moderne » en éléments vitrées et on coupe la grande entrée en hauteur pour installer un entresol des plus vilain. La seule façade d’origine est celle donnant sur la calle San Martin.

1987 : La ville reconnait l’ensemble comme « Témoignage vivant de la mémoire citadine ».

2000 : La ville déclare l’ensemble Güemes comme étant un site d’intérêt culturel.

2003 : L’entreprise  Tango Entertaiment S.A se lance dans la rénovation de la salle de Théâtre et du restaurant du sous sol. La salle était alors abandonnée, dans les années 80 il y eut jusqu’à un club de streap-tease.

null2004 : L’administration de la Galeria Güemes décide de commencer des travaux de restauration. L’Atelier de l’architecte Reinaldo Lemos est en charge des travaux. Le 21 octobre, le théâtre est ré inauguré.

2008 : Les travaux de restauration sont achevés, le complexe de tango se situant dans l’ancienne salle de spectacle du sous sol est ré ouverte au public. Elle se nomme Astor Piazzola.

2010 : En avril, le mirador est ouvert au public, on peut s’y rendre pour admirer les toits de Buenos Aires.

2011 : En juillet, début des travaux de ravalement de la façade donnant sur la calle San Martin.

Photo : En 2007, achèvement de la rénovation du restaurant du sous sol.

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Photos : Deux époques, le déclin du Teatro Florida qui dans les années 50 n'attire plus qu'un public masculin. et le renouveau en 2008 en spectacle de tango.

Le plus haut des gratte-ciels de Buenos Aires en 1915 :

Pour la petite histoire, en 1910 est inauguré l’immeuble « La Inmobiliaria » dernière cuadra de l’Avenida de Mayo sur la Plaza Congreso (L’immeuble existe toujours) est haut de 82 m du haut des pointes surmontant ses deux coupoles. Ce qui le transforme en bâtiment el plus haut de Buenos Aires en cette année. En 1915 avec l’inauguration de la Galeria Guemes et de son building de 80 m, on peut croire que ce dernier ne dépasse pas en hauteur « La Inmobiliaria » mais on y porte aussi une pointe pour atteindre les 87 m. Ce qui le rend incontestablement en 1915, le bâtiment le plus haut de Buenos Aires. Autre prétendant le « Railway Building » (encore debout sur le Paseo Colon), construit entre 1907 et 1910 et inauguré en 1914, mais qui ne dépasse pas 79 m. (80 disent certains). Nous avons la chance de pouvoir encore aujourd’hui aller admirer ses trois constructions toujours intactes ! L’Edificio Güemes fut donc le plus haut bâtiment de 1915 jusqu’en 1923, détrôné par le Palacio Barolo du haut de ses 100 m.

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Photo aérienne de 1925 du centre de Buenos Aires. Quelques points de référence.

1 - Emplacement de la Galeria Güemes, on apperçoit le phare la coiffant.

2 - Banque de Boston toute neuve, terminée en 1924, un des premiers immeubles longeant la Diagonal Norte.

3 - L'immeuble du quotidien La Prensa sur Avenida de Mayo.

4 - L'immeuble de l'actuelle Présidence de la Ville (Mairie)

5 - La Cathedrale

6 - L'Archevéché (démoli, incendié par Peron le 16 juin 1955)

7 - Banco de la Nacion transformé (toit à la Mansard) tout juste en 1911, puis démoli totalement en 1937. Un nouveau le remplace depuis 1940.

8 - Les travaux de percement de la Diagonal Norte.

9 - L'église et le patio de Nuestra Señora de la Merced. (identique à aujourd'hui)

a - Avenida de Mayo

b - Plaza de Mayo

c - Diagonal Norte

d - Calle Florida

nullLes conseils du Petit Hergé :

A voir absolument. Facile d’accès surtout pour tous ceux qui passent sur Florida ou qui sont sur la toute proche Plaza de Mayo. Depuis que la façade sur San Martin est toute propre, un régal ! Un bar (ou plutôt self service) justement à l’entrée sur San Martin, vous donne un moment de repos pour admirer la galerie. La Galerie est ouverte en semaine, n’y passez donc pas le week-end, vous allez y perdre l’ambiance. Le sous sol est toujours ouvert au public pour les spectacles de tango qui sont au niveau de la qualité dans la moyenne de ce qui est proposé à Buenos Aires. Depuis 2011, on peut avoir une visite guidée et monter au sommet du bâtiment pour avoir un beau panorama sur la ville. Allez y !

Photo : Détail de la décoration des ascenseurs.

 

A lire aussi dans le Petit Hergé :

La Prensa (Avenida de Mayo - Buenos Aires)- La Prensa : A quelques pas de la Casa Rosada, au 575 de la fameuse avenue de Mayo, s’élève un édifice à l’architecture étonnante ; autrefois le siège de la Prensa, l’un des plus vieux quotidiens encore édités à Buenos Aires, le lieu est aujourd’hui occupé par les services culturels de la ville qui y proposent expositions et représentations en tous genres. La visite de l’édifice vaut déjà le détour !

 

 

La Calle Florida de Buenos Aires (Capital Federal) - La Calle Florida : 10 blocs de long, de San Martin à Avenida Córdoba dans le quartier de Retiro. De Avenida Córdoba à Calle Rivadavia dans le quartier de San Nicolás. Se nomme San José en 1770, Florida en 1814, puis Perú en 1829, Florida en 1856. Ensuite n'a plus jamais changé de nom. En 1827 devient la principale rue commerciale de Buenos Aires, en 1971 devient piétonne....

 

 

Buenos Aires en 1750- Buenos Aires en 1750 : Petite recherche pour recouper quelques infos concernant le gros village de Buenos Aires en cette année 1750. Comment peut on y vivre, quels en sont les habitants, quel était le poid politique et commercial de cette communauté qui se developpe. Comment était sa physionomie, son extention, et ses nouvelles constructions. De nombreuses questions que je me suis posé. Voici les premiers infos, comme si nous y étions en temps réel en cette belle année 1750...

 

Grands Magasins Harrods de Buenos Aires- Grands Magasins Harrods de Buenos Aires : Harrods-Knighstbridge de Londres fut fondé en 1849, et en 1914, ouvrit la seule succursale mondiale de la marque : Harrods-Buenos Aires dans la calle Florida. Depuis 1998, le grand magasin est fermé, mais a pu conserver à la fois ses façades et sa décoration intérieures d'origine. A plusieurs reprise depuis cette date, on nous annoncé sa réouverture prochaine, et une multitude de nouvelles enseignes et de nouveaux projets ont été avancés. A chaque fois sans succès, le bâtiment est resté endormi et attend un coup de baguette magique pour revenir à la vie. Depuis fin 2009, l'espoir revient avec un nouveau projet d'une réinstallation des grands magasins Harrods pour 2013...

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